mardi 13 septembre 2016

De l'eau pour les éléphants

//13 septembre 1916//Il y a 50 ans, on pendait, dans un cirque, l'éléphant Mary.
Le Théâtre de la Grande Ourse défend les arts du cirque, mais milite pour un cirque sans éléphant. 
Le TGO, c'est ce théâtre militant, engagé et citoyen, qui défend les libertés individuelles et lutte contre toutes les formes de pensées régressives sur l'homme, sur sa condition humaine mais aussi celle des animaux, sans exception. Le Théâtre de la Grande Ourse, en ce jour tragique étend défendre auprès des élus de la ville de Fumay le concept de cirque sans animaux sauvages sur la commune.


Les Américains avouent un petit penchant pour le lynchage. Ils ont pendu des "Nègres", des hors-la-loi, des Indiens... Aujourd’hui, 13 septembre 1916, c’est une malheureuse éléphante de cinq tonnes nommée Mary qui est pendue haut et court, coupable d’avoir tué son nouvel aide-soigneur. Le meurtre se déroule le 11 septembre 1916. Depuis 18 ans, cette éléphante est la star du Sparks World Famous Circus : "The Largest Living Land Animal on Earth", clame la pub du cirque. Mary attire une foule formidable à une époque où la télévision n’a pas encore diffusé des images de Demis Roussos. C’est le père du propriétaire du cirque, Charlie Sparks, qui l’avait achetée à l’âge de 4 ans. Elle a donc été élevée comme une enfant de la famille, choyée et aimée. Elle n’a jamais été battue et n’obéit qu’à la douceur. Ses soigneurs ont la formelle interdiction de la bousculer. Sur la piste, outre se faire admirer, son numéro consiste à se tenir sur la tête, à jouer des instruments de musique, à frapper une balle avec une batte de base-ball tenue par sa trompe.


La veille, Paul Jacoby, le soigneur des éléphants, avait engagé à Saint-Paul, une petite communauté de mineurs de Virginie, un aide nommé Red Eldridge. Employé d’hôtel, celui-ci ne s’y connait pas plus que ça en éléphants, mais il est de bonne volonté. Paul lui confie la tâche de laver les pachydermes et de les faire boire. Le lendemain, le cirque arrive en train spécial à Kingsport, dans le Tennessee. Comme d’habitude, les éléphants défilent dans la rue principale, au sein de la parade, pour attirer les spectateurs. Big Mary devance Topsy, Queen et les deux bébés Ollie et Mutt. Le soir, les représentations s’enchaînent. En milieu de soirée, Paul demande à Eldridge de mener ses protégés à une mare proche pour s’y abreuver. Folle de rage, elle le piétine. En route, Mary aperçoit de délicieux melons d’eau dans un champ. Elle s’arrête pour s’en saisir. Mais Eldridge veille. Oubliant les recommandations de douceur, il la pique derrière l’oreille avec le crochet. Quel manque de tact ! Mary pousse un formidable barrissement, saisit l’impudent dans sa trompe avant de le projeter en l’air. Puis, folle de rage, elle le piétine. Eldridge n’a même pas le temps de regretter son boulot à l’hôtel, il est déjà mort.

Un hurlement s’élève de la foule venue assister à la sortie des éléphants. Les spectateurs s’enfuient à toutes jambes. Un maréchal-ferrant, dit-on plus tard, aurait tiré cinq balles sur Mary, sans aucun effet. Ayant entendu les cris d’horreur, Sparks accourt auprès de son gros bébé, qu’il calme en lui caressant la trompe. C’est alors qu’il découvre le corps sans vie d’Eldridge. La foule, qui s’est approchée, demande la mort de Mary. "Kill the elephant !" Les forces de l’ordre débarquent pour arrêter la meurtrière et la conduire jusqu’à la prison du comté.Habituellement, quand un animal de cirque tue un dompteur ou un autre employé du cirque, on s’arrange pour le débaptiser et le revendre à un autre établissement. Ni vu ni connu. Mais dans le cas de Mary, elle est trop célèbre pour être escamotée ainsi. Déjà, le maire de la prochaine étape menace de faire annuler la représentation si l’éléphante est présente. Que faire ? Sparks n’a pas vraiment le choix : pour éviter la faillite, il lui faut obéir à la volonté du peuple : mettre à mort Mary.

Des milliers de personnes pour le lynchage.//Reste à arrêter le mode d’exécution le plus expéditif et le moins douloureux. Il faut aussi qu’elle se déroule en public. Lui tirer une balle dans la tête ? C’est délicat en présence de la foule. L’électrocuter ? Il n’y a pas suffisamment de courant dans ce trou perdu. Reste la pendaison. Faute de séquoia dans le coin, capable de soutenir un corps de cinq tonnes, on pense à la grue montée sur un wagon de chemin de fer qui se trouve à la gare ferroviaire de Clinchfield. Elle est capable de hisser 100 tonnes. Durant la nuit du 12 au 13 septembre, le train du cirque rallie donc Clinchfield pour organiser le lynchage. L’aube du 13 septembre se lève noyée sous la pluie. Babar et Céleste se rendent à la Maison-Blanche pour convaincre le président américain Woodrow Wilson de faire grâce à leur camarade. Il refuse. Pourquoi ? Secret défense... Durant l’après-midi, le cirque donne une première représentation sans sa vedette qui attend à l’extérieur, enchaînée, allant et venant nerveusement.

Le spectacle achevé, il est temps de passer à l’exécution, des milliers de personnes se ruent autour de la grue ferroviaire pour assister au lynchage. Pour tromper son éléphante, Sparks organise un simili défilé jusqu’à la grue avec tous les pachydermes se tenant par la queue. Selon des témoins, Mary hésite, barrit sourdement à plusieurs reprises, elle est manifestement inquiète. Dès que la troupe arrive sur le lieu de l’exécution, des employés du cirque se précipitent pour enchaîner la condamnée aux rails. Pendant ce temps, les autres éléphants sont éloignés et des employés creusent la tombe de Mary à 200 mètres de là.

Mary étouffe après une longue agonie.//Le lynchage peut commencer. Un homme enroule la chaîne de la grue autour du cou de Mary, la foule devient silencieuse. Au signal, le conducteur de la grue met en route le treuil. Mary n’a pas le temps de comprendre ce qu’il se passe qu’elle est déjà suspendue. Les bourreaux assistants ayant oublié de la détacher du rail, les tendons de ses pieds rompent les uns après les autres dans d’insupportables claquements sonores. Soudain, l’énorme masse retombe lourdement sur le sol. La chaîne autour du cou s’est rompue. La foule prend ses jambes à son cou en hurlant de frayeur, mais Mary ne parvient même pas à se relever. Sa hanche est brisée. Un employé du cirque finit par se précipiter pour fixer plus solidement cette fois la chaîne autour du cou de la mourante. Mary est de nouveau hissée en l’air. La malheureuse bête étouffe après plusieurs minutes d’agonie.

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